Si vous avez tendance à vous réveiller en pleine nuit, ce scénario vous paraîtra sans doute des plus familiers: vous ouvrez les yeux dans le noir complet et votre cerveau sait aussitôt l’heure qu’il est. Peut-être 3h19. Ou peut-être ne reste-t-il que 37 minutes avant la sonnerie du réveil. Quoi qu’il en soit, il est toujours à peu près la même heure. Votre esprit est soudain alerte au beau milieu de ce qui aurait dû être une bonne nuit de sommeil. Selon une étude menée sur le sommeil à l’échelle mondiale par la, 67% des adultes se réveillent au moins une fois dans la nuit. Même si un réveil nocturne occasionnel n’a rien d’alarmant en soi, sa récurrence risque néanmoins d’influer sur votre productivité et votre humeur le lendemain. Une étude publiée dans le magazine met en relation la privation de sommeil avec un état de colère et d’agressivité accrues.
Alors qu’en est-il? Nous avons demandé à des spécialistes du sommeil d’expliquer ce phénomène. Découvrez leurs réponses, ainsi que des astuces pour se rendormir. Ou, encore mieux, ne pas se réveiller du tout.
D’abord, sachez que l’on se réveille tous dans la nuit. C’est la partie “toujours à la même heure” qui pose problème.
“Tout le monde enchaîne les courts réveils – cinq à sept en moyenne – au fil de la nuit, entre chaque cycle de sommeil”, déclare Shelby Harris, psychologue clinicienne, spécialiste certifiée de la médicine du sommeil exerçant et autrice de “Guide contre l’insomnie à destination des femmes: comment bien dormir sans somnifère”. Ce genre de réveil est absolument normal et, en général, suivi d’un rendormissement rapide accompagné d’une amnésie au matin.”
Toutefois, il n’en va pas de même pour les réveils fréquents à heures fixes qui, eux, risquent de perturber vos cycles de sommeil. “Privé de la phase de consolidation, on se sent fatigué, somnolent et comateux durant la journée, sans compter les heures de repos nocturne en moins et l’altération de la profondeur du sommeil”, poursuit-elle.
Se réveiller toutes les nuits pourrait être le signe d’un problème de santé sous-jacent
“On se réveille la nuit pour toutes sortes de raisons, mais certaines restent assez communes”, explique Mark Aloia, chef de file de l’innovation comportementale.
Parmi ces raisons figurent l’insomnie (il estime qu’environ 80% des insomniaques se réveillent tant en début qu’en milieu de nuit) et l’apnée obstructive du sommeil, caractérisée par des interruptions répétées de la respiration durant le sommeil, ce qui engendre des réveils nocturnes. Il est important de consulter un médecin afin d’écarter ces pathologies en cas de réveils fréquents à heures fixes. Pas seulement pour la qualité de votre sommeil mais pour votre état de santé général.
“Les troubles du sommeil, comme l’apnée, peuvent causer de nombreux problèmes de santé, tels que l’hypertension, les maladies cardio-vasculaires, les infarctus ou le diabète”, ajoute-t-il. “Ils augmentent les risques d’arythmies et d’insuffisances cardiaques et même d’accidents de la route ou professionnels.”
S’il n’a aucun problème de santé, cela vient sans doute du mode de vie. C’est la triste vérité: plus nous vieillissons, moins nous dormons. “Les adultes jouissent de phases de sommeil lent profond (le cycle de sommeil non-paradoxal le plus profond) moins importantes et se réveillent donc plus souvent dans la nuit”, explique Terry Cralle, spécialiste du sommeil à l’institut de recherche.
De plus, des facteurs tels que le bruit, la lumière (et notamment le fait de consulter son téléphone au réveil) ou ce que l’on a mangé lors du dîner influent sur la profondeur et la longueur des cycles de sommeil. “L’alcool aide à s’endormir, mais fragmente systématiquement la seconde moitié de la nuit”, précise Mark Aloia.
Un autre élément qui va de pair avec l’âge? L’état hormonal, notamment chez les femmes. “Durant la grossesse, les changements hormonaux, le besoin d’uriner, les angoisses et l’inconfort d’un ventre de plus en plus gros perturbent le sommeil”, reprend Shelby Harris. “Lorsque les femmes entrent dans la périménopause, les bouffées de chaleur et les sueurs nocturnes viennent aussi altérer la qualité du sommeil.”
Les réveils nocturnes à heures fixes seraient parfois liés au stress
Même si aucune étude n’explique aujourd’hui pourquoi nous nous réveillons à peu près à la même heure chaque nuit, Mark Aloia attribue ce phénomène à un état d’hypervigilance ou d’inquiétude.
“Très souvent, lorsque nous nous endormons préoccupés, nous digérons les problèmes durant certaines phases de sommeil. S’ils sont toujours là au réveil, c’est qu’ils n’ont pas été complètement traités”suggère-t-il.
Il recommande donc à ceux qui souffrent de troubles du sommeil de garder un journal à soucis près du lit, afin d’y consigner tout ce qui est source de stress et les aider à éliminer les ressassements nocturnes.
Shelby Harris ajoute qu’anticiper un événement – attendre les pleurs potentiels d’un enfant, par exemple, ou même se demander si la nuit se déroulera sans interruption – allègerait le sommeil et causerait davantage de réveils.
On peut reprogrammer le cerveau à faire ses nuits
En tout premier lieu, il est important d’établir une routine de sommeil saine: éteindre tous les écrans 30 à 60 minutes avant le coucher, entretenir un rythme de sommeil régulier, même le week-end, et maintenir la chambre à une température confortable (18°C, selon les recommandations de The Better Sleep Council).
Terry Cralle conseille également quelques astuces pour se rendormir lorsque l’on se réveille à heure fixe. D’abord… arrêter de regarder l’heure!
“La nuit, il vaut mieux éviter d’avoir une horloge dans son champ de vision, ou de consulter l’heure sur son téléphone si l’on se réveille”, déclare la spécialiste. “Sinon, on calcule inévitablement le temps qui passe et les heures de sommeil restantes avant la sonnerie du réveil. Ce qui peut facilement induire stress et angoisse, au point de gêner le rendormissement.”
Il est également important de ne pas se forcer à dormir. Cela peut paraître illogique, mais cela finit par devenir un nouveau facteur de stress.
“Si vous ne vous endormez pas au bout de quinze ou vingt minutes, levez-vous et adonnez-vous à une activité relaxante, distrayante avec aussi peu de lumière que possible”, conseille-t-elle. “Lecture, livre audio, coloriage, tricot, puzzles, tout ce qui détournera l’attention vous donnera sommeil plus rapidement. Et vous passerez au final moins de temps à scruter le plafond au lieu de rêver.”